Né à Paris en 1938 de parents juifs polonais, mort dans la même ville en 1997, Roland Topor a dynamité à grands coups d’humour et de transgression les domaines les plus variés de l’expression : peinture, illustration, dessin de presse, gravure, photographie, sculpture, décors de théâtre, cinéma tout court ou cinéma d’animation, programmes télé, et bien sûr littérature.
Topor a mené son oeuvre et sa vie au mépris du conformisme et des conventions commerciales. Il est constamment resté au contact des mondes de l’art et de la culture internationale. Dans le foisonnement de son travail, se lisent des affinités et des références aux mouvements artistiques majeurs du XXe siècle : Dada, Cobra, Fluxus, la peinture gestuelle, le Body Art, le Pop Art – mais paradoxalement, aux racines mêmes de son expression, on trouve sa parfaite connaissance du graphisme du XIXe siècle… Le tout, bien sûr, transfiguré par son humour noir et sa passion de la liberté : «Pour gagner ma vie, disait-il, je ne dispose que des produits dérivés de ma peur.»
Il fait sienne la phrase de Cioran – « Le réel me donne de l’asthme… » – poursuivant, « le réel est insupportable sans le jeu… Je ne peux perdre le contact avec le réel, mais pour pouvoir le supporter j’ai besoin de ce jeu abstrait qui me permet de déceler ce qui peut encore être humain. » Pour Topor, le domaine de recherche est donc l’homme, affublé de toutes ses frustrations. Que le quotidien soit à la fois irréel, hallucinant et absurde devient alors chose normale. Reste à l’artiste à désacraliser son sujet en maniant la perversion du réalisme, la cruauté du vrai, et l’inquiétude de l’ironie.
Nombre de musées internationaux prestigieux ont consacré des expositions à Roland Topor : Stedelijk Museum d’Amsterdam (1975), Centre Pompidou (1976), Stadtmuseum de Munich et Moderna Museet de Stockholm (1984), Palazzo Reale de Milan (1986) enfin Institut Français de Naples (1995), qui fut la dernière exposition présentée du vivant de l’artiste. Celle du Museo dell’automobile de Turin a suivi en 2001.
Si Topor a publié ses textes et ses dessins dans un nombre étonnant de périodiques, il n’a collaboré au long cours qu’avec deux titres de presse parmi les plus grands, The New York Times et The New Yorker. Parmi ses fréquentes incursions dans d’autres domaines créatifs, il faut absolument citer « La planète sauvage », long-métrage d’animation salué par le Prix du Jury au Festival de Cannes 1973, et « Le locataire chimérique », roman dont Polanski tira en 1976 son film « Le locataire ». Ce fut encore Topor qui fournit les dessins de la lanterne magique dans le « Casanova » de Fellini, et qui signa avec Henri Xhonneaux le film « Marquis » (1989). Il participa aussi comme acteur à « Nosferatu » de Werner Herzog (1977), « Un amour de Swann » de Volker Schlöndorff (1984), et « Trois vies et une seule mort » de Raoul Ruiz (1995), aux côtés de son vieil ami Marcello Mastroianni.